« Pécheur d’Egyne » Dessin sur papier (50 / 65 cm)

Les bateaux

J’envie leur solitude et j’envie leur cap, leur poids de pachydermes et leur légèreté d’oiseaux, leur fragilité, leur audace, leurs départs et leurs retours…

Des milliers de peintres du dimanche, dans les ports font des « marines »… Ont-ils le même rêve ? Est-ce leur façon de le vivre, de le nourrir qui est différente ?

Ils n’aimeraient certainement pas « mes » bateaux, et il est rare que j’apprécie un des leurs…il me semble que leurs images sont fabriquées de l’extérieur, qu’elles s’imitent l’une l’autre, que la vérité n’y est pas… leurs bateaux sont trop jolis, trop bien peints…Ont-ils jamais navigué, cassé un safran, eu le mal de mer ? Ont-ils remplacé des bordés, calfaté une coque, respiré les odeurs fortes du goudron et des algues ? Ont-ils passé des nuits à la barre sous les étoiles avec une cargaison d’hommes endormis, quand on ne sait plus très bien si le vent a tourné, si le compas s’est déréglé, si la carte est fausse ou si le sommeil vous joue des tours ? Ont-ils jamais essuyé un coup de vent ?

Ont-ils jamais vu les paquebots de Dufy ou les caravelles de Breughel ? Ont-ils jamais lu St John Perse ?

Ont-ils jamais réfléchi au pouvoir d’un bleu à coté d’un noir, à l’équilibre d’une grande forme arrondie et d’une multitude de petites formes aigües ? Est-ce leur langage qui n’est pas à la hauteur de leur rêve ou est ce leur rêve qui est tout petit ?

C’est si joli les bateaux bien peints qui se balancent dans les ports, c’est bien rassurant de les voir amarrés et sagement alignés pour la pose. On pourrait croire qu’ils ont été inventés pour faire joli sur les marines… C’est bien rassurant mais c’est quand même un mensonge…